ATE(LIÉ·E·S)



Ate(lié·e·s) est un dispositif proposant plusieurs entretiens autour de la thématique de l’atelier, du refuge , de l’émancipation et de la cabane. Chaque entretien est une vision d’un·e artiste, d’un·e artisan·e, d’un·e technicien·ne, d’un·e designer… sur son espace de production et de création. Par une question commune en introduction de chaque discussion Ate(lié·e·s) propose des pistes de reflexion, des lignes de tension, des points communs et des différences entre des personnalité·e·s du monde des arts (au sens large).



Ate(lié·e·s) est un projet alimenté par Lukas Ruelle, mis à jour le 1/06/24, composé en Asfalt et Monogrotesk

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RETOUR EN ARRIÈRE
PETIT JACQUART / 4.05.24


Petit Jacquart (Alexis Petit), est un tatoueur œuvrant à Club Chemise aux côtés de Yakes, Ponxe, Anton Paul, Rister… depuis quelques années.


Anciennement graphiste, il navigue d'atelier en atelier en débutant sa pratique plastique au Plateau Urbain avant de s'installer récemment, avec le autres, dans un atelier à Montreuil ; au sein d'un bâtiment destiné à être détruit.


Je le rencontre pour un entretien autour duquel il me tattoo, au sein de sa nouvelle exposition « Vastes recoins » à la Galerie du PopUP, atenant au PopUP du Label dans le XIIe arrondissement de Paris.


Le concept du tatouage en quetion est de séléctionner un petit espace carré à l'aide d'une loupe sur une fresque et de se faire tatouer le résultat de la découpe. La discussion commence ici.

Petit Jacquart. *en commençant le tatouage* J’aime bien l’idée que dans cette nouvelle expo les œuvres sont complètes, elles passent par la poésie, la peinture, la création de textes dédiés, le dessin… D’avoir tous les univers possibles réunis.


Lukas Ruelle. C’est une bonne introduction car j’allais te demander ce que c’était pour toi l’atelier.


P.J. Il y a une espèce de liberté, c’est un cocon. C’est très personnel. C’est un univers où je me sens le plus chez moi, limite plus qu'au sein de mon appartement. C’est là où je ne vais pas avoir de limite dans ce que je veux explorer. Un vrai terrain de jeu.


L.R. Donc quand tu dis cocon tu conçois presque l’atelier comme un refuge finalement !


P.J. Mais totalement !


L.R. C’est ça que j’essaye de trouver chez les gens, tu n’es pas le premier à me le dire. Tu considérerais que c’est une sorte de stase par laquelle tu t’ouvres au monde l’atelier ?


P.J. C’est une belle porte d’entrée sur le monde. C’est cet espèce d’entre-deux, d’univers parallèle. Je passe du monde où je montre ce que je fais au monde ultra personnel que je suis le seul à connaître et à défendre. 


L.R. Ça fait combien de temps que tu es en atelier ?


P.J. Deux ans je pense, c’est hyper dur car on a fait que changer d’endroit *en parlant de Chemise Club*, on a commencé par un lieu qui s’appelle Plateau Urbain pendant un peu plus d’un an. Ça a été mon premier atelier… Une bonne expérience ! Je ne voulais plus revenir chez moi.


L.R. Parce que tu n’arrives plus à créer chez toi ?


P.J. Ouais exactement, en termes d’énergie créative, en atelier il y a un truc de « t’es là pour quelque chose donc fais ». Chez soi il y a trop de distractions. 


L.R. Et tu as complètement arrêté le graphisme ?


P.J. Yes ! J’en fais pour moi quand il y a besoin mais sinon oui.


*La discussion continue et s’oriente sur l’avancement de mon tatouage*


[…]


L.R. Tu considérerais que tu mets un petit bout de ton atelier dans tes œuvres ?


P.J. Plus je change d’atelier pour un plus grand, plus je fais autre chose : du bois, de la céramique, de la découpe… On peut faire du volume ! 


L.R. C’est un espace commun ?


P.J. Exactement ! Avec un ilot commun !


L.R. Et tu dirais que cela tente les autres de te voir faire au sein de l'atelier ? 


P.J. Pas tant que ça, ils ont leur univers.


L.R. Jim Kylam qui vous a rejoint récemment, quant il était sans atelier, il avait vraiment comme une panne dans son travail. Du moins il expliquait cela en story Instagram.


P.J. Tu as une partie de toi que tu n’as plus ! Tu n’es pas à la rue, mais pas loin. Tu as une énergie que tu peux mettre nulle part.


L.R.. Tu te vois toujours en atelier commun dans le futur ? 


P.J. Pour le côté technique, pour la confrontation des travaux et pour rigoler oui. Mais je peux être assez solitaire. J’ai surtout envie de faire des gros gros volumes.


L.R. Tu décalerais ton shop tattoo à l’atelier ?


P.J. Non c’est un autre univers ! T’as pas la même énergie donc c’est bien de différencier.


L.R. Tu envisagerais le tatouage avec le work in progress de l’atelier ? 


P.J. Je peux complètement l’envisager, maintenant il faut trouver une personne qui peut suivre cette frénésie ahah.


L.R. À terme, cela t’intéresserait de diversifier les machines, une table de sérigraphie ou autre ?


P.J. Pas tant que ça je me découvre totalement dans une pratique à la main, presque de l’ordre des beaux ordres. Je veux m’éclater et ne pas être un technicien (bien que des personnes s’éclate en sérigraphie je ne dis pas le contraire). 


L.R. Tu arriverais à expliquer un peu pourquoi les choses qui sortent d’atelier se « ressemblent » ?


P.J. Pour moi c’est une question d’époque. C’est très dur de dire qu'on est dans tel ou tel mouvement lorsque l’on est au présent, mais dans quelques années on parlera peut-être de celle-ci comme d'un retour à quelque chose.


L.R. Au dessin naïf ?


P.J. Ouais complètement ! Si tu regardes les tatoueurs ;  les sujets, en ce moment, sont un peu les mêmes. Les corps fantaisistes, les fleurs, les oiseaux… l’onirisme. On est peut-être fasciné par des choses que l’on perd peu à peu ?


L.R. Merci PJ !


P.J. Merci à toi, j’espère que tu aimes ton tattoo !